Oh mon bateau !

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Ou le syndrome de Marius, vous savez le gars dans le roman de Pagnol

J’ai rencontré il y a des lustres un monsieur qui était président d’une association dont le but des membres était de faire le tour du monde en bateau et en construisant, en achetant, en louant le bateau de leur voyage.  Donc l’association aidait ses membres avec des infos, des bons plans, mettre les gens en contact. Etc.

Il y avait 2400 membres affiliés. A ma question : « combien ont fait le tour du monde ? et combien vont le faire ? », il m’a répondu : qui l’ont fait, une dizaine et qui vont vraiment le faire, pas beaucoup plus !

Je m’étonnais du faible nombre de « passage à l’acte ». Diantre, 10-20 personnes sur 2400 c’est peu quand même.

Il me répondit : vois-tu, dans cette association il y a des catégories de membres très différentes qui partagent en apparence le même but mais qui en réalité n’ont pas du tout les mêmes aspirations, ne sont pas du tout dans la même façon de vouloir vivre ce projet ou  ne développent pas la même détermination pour y arriver.

  • Il y a ceux qui sont inscrits parce que ça fait bien, chic ou/et que ça leur donne un petit côté aventurier et leur donne une image de ce que qu’ils ne sont pas en réalité. Mais pour eux c’est important pour l’image qu’ils ont d’eux même ou socialement. Jamais ils ne partiront.
  • Il y a ceux qui sont sincères, qui voudraient faire le tour du monde mais qui ne le feront pas car qui ne bougeront pas le petit doigt pour le faire. Ca reste une idée théorique, un rêve qu’ils entretiennent mais qui ne prendra jamais corps. Mais ils le caressent en permanence, l’envisagent et même par moment ne seraient pas loin de passer à l’acte mais .. jamais ils ne partiront
  • Il y a ceux qui oeuvrent vraiment à construire un bateau ou se donner les moyens de le louer ou de l’acheter. Il y en a beaucoup. Mais ceux-là aussi ne partent pas. En effet en réalité le bateau est le but. Il est le vecteur de leur espoir, de leur rêve. Ils sont dans des préparatifs qui ne prennent jamais fin. J’en ai connu même plusieurs qui ont construit un bateau, certains qui en ont acheté un ou même le comble, loué à perte, mais, le bateau reste à quai. Parfois ils se donnent bonne conscience en faisant des ronds dans l’eau dans le port ou pas loin de la côte mais .. ils ne partiront jamais.
  • Il y a ceux, c’est ceux qui me plaisent le plus, qui eux partiraient s’ils avaient un bateau. Ils en ont la carrure et le mental et eux vraiment peuvent le faire. Mais le bateau est un obstacle : ils n’ont pas les moyens. Et même s’ils essaient c’est hors de leur portée. Ils me font de la peine car eux le feraient vraiment mais un obstacle quasi insurmontable se dresse devant eux.
  • Et puis tu le devines il y a ceux qui cochent toutes les cases :  ils ont réussi à avoir un bateau et eux ont le mental, la vraie envie de partir. Et ils le font. Un voyage autour du monde dure en moyenne 3 ans. On a constaté que ceux qui le font comme ça en un seul bloc reviennent et font des dépressions sévères. C’est pour ça que l’on conseille à ceux qui le font de s’organiser de manière à le faire en plusieurs blocs par exemple de 6 mois histoire de ne pas perdre pied et de couler mentalement.

Et mon rôle dans tout ça ? J’essaie de relier toutes ces opinions, ces options et ces façons de voir ce voyage. C’est il est vrai, assez difficile, car elles sont en réalité incompatibles. J’ai bien réussi à faire travailler en équipe des gens qui ont un bateau avec des gens qui partiraient s’ils en avaient un mais ça ne fonctionne pas, peu de résultats. Pourquoi je partagerai mon bateau dit celui qui en a un qui en réalité masque le fait qu’il ne partira pas. Pourquoi je laisserai partir un mec avec mon bateau et moi je ne pars pas .. Je n’ai pas confiance. Des populations compartimentées incapables de s’arranger et de se retrouver dans le même bateau, sans jeu de mots. Et c’est valable pour tous sauf les 1% qui déterminés et courageux construisent, réalisent et finissent leur projets, rêves et envies.

J’adore cette association. Tu sais, tout ça est une très bonne image de la vie en général. De nos projets, de notre détermination à les réaliser, de notre attitude et parfois de notre lâcheté à nous dégonfler devant les obstacles.

Et il m’a regardé bien droit dans les yeux et en souriant m’a demandé : et toi, dans le projet de tour du monde tu serais où ? Dans la vie en général tu es dans quelle catégorie ? Ceux qui ne vont même pas s’inscrire à l’association et qui vivent une vie sans rêve et sans but et tracée d’avance? Les frimeurs et les beaux parleurs, ceux qui se mentent à eux-mêmes, les rêveurs, les indécis qui restent à quai toute leur vie, ceux qui se trompent de route tout le temps ou ceux qui vivent pleinement et se donnent les moyens de réaliser et de passer à l’action.

Ayons également une pensée, une seconde,  pour tous ces gens que nous croisons qui sont dans des postures desquelles ils ne sortiront jamais et en particulier les politiques -aisés à identifier- , les people, les comédiens, les artistes, les chefs de tous poils. Ils restent figés, collés à un dogme, une idéologie dont ils ne démordent jamais et qui ne les mènent nulle part. Si ce n’est à rester dans une catégorie dont ils ne sortiront jamais et où ils continueront à ne rien faire.

 

Et vous, où est votre place ? En êtes vous satisfait ? Vous l’êtes vous auto attribuée ? L’heure n’est-elle pas venue de prendre la mer ?

Aie aie Captain ..

 

Mike Grinn – Avril 2022

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